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Compte courant d’associé et limitation de la déductibilité au regard de l’IFI

Cher(e)s Clients,

Dans une précédente brève (« Le compte courant d’associé dans les SCI patrimoniales : prenez garde aux chausse-trappes ! »), nous vous présentions les nombreux enjeux patrimoniaux résultant de la constitution des comptes courants d’associé (apport de liquidités, prêt de …

Dans une précédente brève (« Le compte courant d’associé dans les SCI patrimoniales : prenez garde aux chausse-trappes ! »), nous vous présentions les nombreux enjeux patrimoniaux résultant de la constitution des comptes courants d’associé (apport de liquidités, prêt de liquidités, distribution faute de liquidités), ces derniers étant juridiquement, pour rappel, des dettes d’une société envers un associé.

Si le recours au financement d’une société via un compte courant d’associé présente des atouts et des inconvénients, qu’il convient d’appréhender, il est à noter que la loi de finances pour 2019 est venue apporter un degré de complexité supplémentaire, lourd de conséquences fiscales, s’agissant de l’évaluation des parts de sociétés immobilières au regard de l’IFI.

En effet, les sociétés immobilières sont généralement évaluées selon la méthode de l’actif net réévalué, qui consiste schématiquement à déduire de la valeur vénale des immeubles inscrits à l’actif de la société les dettes de celle-ci (dont les comptes courants d’associés). Afin notamment d’écarter certains schémas qu’il a considérés comme abusifs, le législateur a entendu encadrer la déduction de certaines dettes pour la détermination de la valeur de la société à prendre en compte pour le calcul de l’IFI.

C’est ainsi que l’article 973 en son III nouveau dispose que les prêts in fine ou sans terme contractés pour l’acquisition d’un actif imposable doivent faire l’objet d’un retraitement dans les conditions ci-après définies :

  • Pour les prêts in fine : un amortissement fictif doit être réalisé chaque année pour réduire l’emprunt d’une somme égale à ce même montant multiplié par le nombre d’années écoulées depuis le versement du prêt et divisé par le nombre d’années totales de l’emprunt ;
  • Pour les prêts sans terme : ce retraitement est opéré en considérant une diminution d’un 20ième par année écoulée.

L’appréhension de la déductibilité du compte courant d’associé en vue d’acquérir un actif immobilier imposable n’est pas sans soulever de nombreuses questions pour le contribuable.

Au regard des travaux parlementaires ayant présidé à la modification de l’article en cause, on constate qu’étaient notamment visés les comptes courants d’associés.

Toutefois, la portée pratique de cette évolution rencontre des difficultés en présence de compte courant d’associé dont l’évolution du solde à la hausse comme à la baisse ne permet plus juridiquement d’identifier le montant de la créance originelle se rapportant à l’acquisition de l’actif imposable. C’est à tout le moins, la lecture qu’en font certains auteurs[1], en considérant que pourrait être distingué le compte courant d’associé et le prêt d’associé. Le 1er consisterait en une remise réciproque[2] caractérisée par une indivisibilité des opérations et une fongibilité faisant perdre aux créances leur nature originelle, faisant ainsi obstacle à l’application du 973 III du CGI. Ce raisonnement est étayé par la jurisprudence ancienne[3] dans sa définition du compte courant d’associé. À l’inverse, un prêt consistant en une opération unique, caractérisant un prêt dédié affecté à l’acquisition d’un actif imposable ferait l’objet du retraitement prévu par le législateur, s’agissant d’une simple avance. On attendra avec impatience la lecture qu’en fera l’administration fiscale.

En pratique, la remise en cause de la pleine déductibilité pourrait être préjudiciable selon les montants en jeu, d’autant que la structuration de cette acquisition si elle a été opérée avant l’instauration de l’IFI, ne saurait avoir été réalisée dans un objectif principalement fiscal. On notera à cet égard, que la clause de sauvegarde[4] valable pour les autres dépenses afférentes à un actif imposable, qu’elles soient ou non financées au travers du compte courant d’associé, n’est pas applicable pour l’achat de l’actif imposable. En d’autres termes, le contribuable ne pourra pas justifier que le prêt n’a pas été contracté dans un objectif principalement fiscal pour éviter la limitation de sa déductibilité s’agissant d’un prêt afférent à l’acquisition du bien.

À ce stade, pour déterminer la déductibilité d’un passif au titre de l’évaluation d’une société immobilière dans le cadre de l’IFI, le contribuable doit s’interroger sur :

  • La date du prêt contracté (en pratique la date du versement) ;
  • L’existence ou non d’un terme prévu pour le remboursement ;
  • La nature du prêt: amortissable ou in fine, compte courant d’associé ;
  • L’affectation du prêt:
    • Pour l’acquisition du bien imposable (actif immobilier ou parts de SCI) ;
    • Pour des dépenses afférentes à un actif imposable, telles les dépenses de réparation, d’entretien, d’amélioration, de construction, de reconstruction ou d’agrandissement.

Ainsi, cette année le contribuable pourra ressentir un sentiment d’insécurité juridique particulièrement prégnant en déterminant cette année la valeur imposable à l’IFI de ses parts. Gageons que l’administration fiscale viendra éclairer la portée du retraitement.

[1] Maitre DESBUQUOIS dans Actes Pratiques et Stratégies Patrimoniales paru en Mai 2019.

[2] Volonté des parties d’établir entre elles un mécanisme de compte courant (élément subjectif), affectation générale au compte de l’ensemble des créances réciproques, pouvant naître dans leurs relations, réciprocité des remises, et alternance des remises.

[3] Cass. civ. 24 Juin 1903 ; DP 1903, I, p 472.

[4] Art 973 II du CGI

Henri DE CLEENE, Service Ingénierie Patrimoniale

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